mercredi 24 avril 2013

Over the edge

Jonathan Kaplan - 1979



A vélo, en skate ou en basket, des grappes de gosses ennuyés arpentent les rues de la ville aseptisée , leurs nuques submergées de soleil, les poches remplies d'espoir. Un stick collé entre les lèvres, une jolie fille au creux de ses bras, Carl profite de son enfance, la mine rieuse mais le regard austère, préoccupé par l’obstination bornée des adultes de croire que tout va bien. Richie, de tout son être, appelle à la révolte, permettant à Carl de laisser libre cours à son imagination, gommant les limites de la raison d'un coup de revolver, bondissant, criant, pillant cette tranquillité maussade qui leur sert de quotidien et dans laquelle les adultes sont drapés. Un jeune oiseau chute et s’éteint dans la poussière, une balle logée dans son aile de vie, le temps s'arrête.. La résistance s'organise, par soucis de vengeance mais aussi de Liberté, un morceau de Rock résonne, les gamins irradient l'espace de leur rage, de leur colère, ils s'amusent , pour la dernière fois peut être, à faire avaler sa hargne à cette autorité menaçante, quitte à en payer le prix. Une ombre en t-shirt, sourire rebelle, mèche indisciplinée lui barrant le front, s'accroche à l'arrière du bus jaune en riant, ultime représentation de l'impressionnante désinvolture avec laquelle Richie se mouvait dans un monde qui n'était pas le sien.


dimanche 21 avril 2013

Lola

 Brillante Mendoza - 2009



Armée d'un parapluie capricieux et d'un gamin agité, Lola claudique à toute vitesse contre 
le Vent, à la recherche de quelques réponses : le nom du meurtrier, le montant du cercueil.. L'enfant désobéissant détale dans un couloir, amenant Lola face au défunt, cadavre silencieux couché dans l'arrière cour d'une morgue régentée à la manière d'une banque , terribles secondes où l'on retient son souffle, les prunelles de la vieille femme flamboient, mais pas question de se laisser submerger. Le poing serré sur un billet trempé, Lola comprend : La Mort est un Business, le temps se calcule en Pesos, pas une minute à perdre, le ciel dégueule des trombes d'eau sur les corps frissonnant, l'image vacille captant l'urgence de l'instant. La vieillesse s'emballe et décide de lutter, par amour ou par fierté, s'armant de toute son expérience pour diriger la barque, une lutte acharnée contre Chronos s'engage. Un tas de chair inerte contre un squelette enfermé, la mâchoire collée entre deux barreaux abîmés, il ne peut y avoir de miracle, Lola le sait.. 




jeudi 18 avril 2013

Le Village de mes rêves

Yoichi Higashi - 1995




Porté par les clapotis indisciplinés de la fraîche rivière, un petit poisson se glisse entre les jambes d'un des gamins, frimousse crispée sous l'ombre d'un large chapeau de paille. Son double barbote non loin de lui, la tête couchée sur une grappe de fleurs, les pieds dans l'eau, une bulle de printemps accrochée à son t-shirt. Une mère aimante, un peu laxiste, un père absent, d'une sévérité folle, et puis ce décor, frivole, immense, voici le cadre dans lequel les deux enfants évoluent. Leurs cris de joie, leurs râles de peine sur la feuille blanche se mélangent, au pied de l'arbre aux trois sorcières ; devant leurs sombres yeux plissés s'étale un spectacle espiègle, parfois cruel, souvenirs prégnants d'une enfance à jamais conquise.

lundi 1 avril 2013

Departures

Yojiro Takita - 2009

Flirtant habilement avec la mort et les corps qu'elle habite , Daigo Kobayashi, le front plissé, se donnant tout entier à l'ouvrage , remue ses phalanges sur les plis immaculés d'un kimono mortuaire. La caméra, discrète, posée auprès des défunts, capte chaque mouvement, chaque relent de vie , sublimant le croque-mort, conférant à son art une dimension céleste. L'alchimie se crée entre le vivant et ses dépouilles, l'âme de la trépassée tremble paisiblement et s'échappe du trou de feu, tentant d'atteindre un Eau-delà gardé par le vieil homme triste, touchant.